Adidas, Arvyda, des poils…

Vous êtes mille à m’avoir taguée sous cette histoire de poils. J’ai lu tous les articles et aucun ne m’a semblé parler du vrai problème. Donc j’ai décidé de jouer du clavier debout.

Retour sur la polémique.

Adidas a choisi Arvida Byström pour sa nouvelle campagne. La nana est connue pour refuser l’épilation. Elle est clairement féministe, militante et en parle ouvertement.

Suite à cette campagne, Arvida a reçu les pires commentaires possibles sur tous ses réseaux. Par des hommes rageux mais aussi par des femmes dégoûtées. Elle a même reçu des menaces de viol (allez comprendre le raisonnement…)

https://www.youtube.com/watch?v=elDe_kHYTb8

Pourtant elle est claire. Elle dit que toutes les femmes peuvent faire des choses féminines de bien des façons et que la féminité est un concept culturel. Elle pense que la société a très peur de ça.

Mais ce fut un tollé général.

Joli coup pour Adidas.

Tout le monde en parle évidemment et ma foi, tant mieux pour eux. Quelque part, il fallait des cojones pour aller chercher un modèle chez Anti-Agency.

Anti-Agency, c’est une agence pas comme les autres…

Nos modèles ne sont pas seulement des porteurs de vêtements (plus cash, il y a l’idée d’animaux qui portent une charge en gros); nous mettons l’accent sur la sélection des filles et des garçons avec personnalité, style individuel et talent. L’agence s’adresse aux gens qui sont trop cool pour être des modèles et des personnes avec de vraies vies sur le point d’exploser dans la musique, la mode, l’art, l’illustration et les industries créatives, etc. Nous sommes là pour fournir des solutions de casting pour les entreprises et pour promouvoir les gens dans lesquels nous croyons.

Adidas visait donc l’atypique. Et a fort bien réussi.

Mais c’est quoi le problème?

Le coeur du problème, c’est la levée de haine contre ces jambes poilues.

Je dois bien vous avouer que je trouve ça inesthétique. Et pourtant, je ne trouve pas inesthétique ceci :

Ou ceci :

J’admets qu’on ne fait que deviner les poils mais c’est Jason Momoa merde.

Pourquoi trouve-t-on l’un inesthétique et l’autre pas?

Parce qu’on nous l’a APPRIS.

Alors je ne dis pas que l’épilation c’est mal, entendons-nous bien. On s’épile depuis l’Egypte antique, la Grèce antique et tutti quanti et les seules périodes de disparition épilatoire correspondent aux pires reculs de l’humanité (ex. : le Moyen Age ne s’épilait pas, diantre).

Je dis juste qu’une fois de plus c’est une vision féminine qu’on nous a ancrée dans la caboche à grands coups de pubs Wilkinson for girls et autres Epilady.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les appareils de torture électrique sont à destination féminine essentiellement. Bizarrement, un homme qui se rase les jambes le fera toujours au rasoir et jamais au dépilateur qui fait ouille.

Ils ont crié parce que ça fait peur.

Une femme qui revendique un tel symbole, ça fout les jetons à tout le monde. Aux femmes qui s’insurgent de voir qu’une nana échappe à ce calvaire permanent qu’on s’impose quasi toutes. Parce que merde, faut oser dire que c’est un truc qui prend du temps, de l’énergie, de l’argent. Et que ce sont des temps que les hommes ne perdent pas. Sans compter tous les emmerdements type poils incarnés, folliculites, brûlure parfois (j’ai un cuisant souvenir à la cheville d’une tentative de cire au micro-ondes de 1999…)

Et ça fait peur aux mecs qui ont la trouille d’une telle affirmation. D’ailleurs, s’ils vont jusqu’à la menacer de viol, c’est évidemment pour la remettre plus bas que Terre parce que faudrait pas qu’elle se sente supérieure avec ses poils. Le viol, c’est de l’humiliation. Et c’est bien ce qu’on a voulu lui faire subir.

Humilier une nana parce qu’elle refuse de se plier aux codes.

Ce n’est que ça.

Et donc on fait quoi?

On apprend, lentement mais sûrement, à faire ses choix pour soi. On se demande, à CHAQUE GESTE, si on le fait pour SOI ou parce qu’on nous a appris à le faire.

Ma main au feu que si on nous mettait ça sous le nez pendant une dizaine d’années, on trouverait ça tout à fait normal.

On apprend à ne pas se dire qu’un homme aux jambes rasées n’est pas un homme (mea culpa public, je suis victime de mes a priori aussi). On apprend à se dire qu’une nana qui ne s’épile pas, c’est comme une nana qui n’aime pas le vert, une question de goût. Et surtout, on apprend à se foutre la paix sur tous ces clichés qu’on nous fait manger de partout tout le temps.

Et toi Chrys, tu t’épileras encore?

Ouaip. Je vous le dis avant que vous ne me le demandiez. J’aime bien la douceur des jambes épilées. Puis je crois que si je comprends la mécanique dans ma tête, c’est un combat d’acceptation de moi-même que je ne suis pas prête à mener. Il y a encore trois ans, j’aurais crié au monstre. Le pas est déjà grand, croyez-moi.

Mais je vais apprendre à trouver ça tout aussi acceptable que des jambes d’homme non épilées.

Et même chose pour les aisselles. D’ailleurs on commence tout de suite.

Allez peace, mes frères et soeurs. Pour un monde où la différence ne méritera plus de menaces de viol.